Manuels scolaires


Évaluation de la place de l'écriture dans les manuels scolaires de 2016 (cycle 3)

Afin d’évaluer et de comprendre l’organisation et le contenu des manuels scolaires d’aujourd’hui, compte tenu de leur place centrale dans l’enseignement en France, Marie-Laure Elalouf a réalisé, pour le Cnesco, une analyse détaillée de 10 manuels de CM1, CM2 et 6e publiés en 2016 et de 10 manuels des années 2000 (État des lieux, Cnesco, 2018).

Pendant longtemps, l’écriture a été enseignée à travers deux manuels scolaires distincts : le manuel de textes et le manuel de grammaire. Durant les années 2000, le manuel unique s’est généralisé. Dans ces nouveaux manuels, la relation entre lecture et écriture était prépondérante mais l’écriture était réduite à une activité terminale.

Dans les manuels de 2016, les occasions d’écrire sont plus nombreuses que dans les manuels des années 2000 et l’écriture n’apparaît plus uniquement comme une activité finale. La notion de différenciation pédagogique a également été incluse dans ces nouveaux manuels. Cependant, l’intégration de l’étude de la langue dans la production écrite reste peu aboutie, avec des informations parfois trop nombreuses. L’utilisation de l’écrit pour apprendre (écriture réflexive, écriture de synthèse) est encore peu développée.

Des occasions d’écrire plus nombreuses en 2016 que dans les années 2000

Les manuels de 2016, qui font suite aux changements de programmes de 2015, invitent plus souvent les élèves à écrire que ceux des années 2000, notamment lors des séquences de lecture et d’étude de la langue (orthographe, grammaire…). Certains manuels ont même intégré des exercices écrits préparant à la prise de parole, en utilisant, par exemple, le brouillon pour rassembler et organiser des idées, et non comme un premier jet.

Le lien entre lecture et écriture est fort dans les manuels de 2016. Ici, l’écriture n’est plus seulement une activité terminale. Cependant, l’objectif des exercices d’écriture liés à la lecture n’apparait pas toujours clairement. Certains manuels utilisent l’écrit pour vérifier la compréhension du texte alors que d’autres abordent directement l’interprétation de celui-ci.

Une intégration non aboutie de l’étude de la langue à la production écrite

Les manuels scolaires de 2016 laissent apparaître de fortes disparités en ce qui concerne le lien entre production de textes et apprentissages formels de la langue dans les séquences pédagogiques, avec un manque de clarté sur la finalité des exercices proposés.

Quelques exemples du manque de clarté dans certains exercices
Trop d’informations disponibles : dans le cadre d’un exercice de production de textes, certains manuels vont jusqu’à donner 15 informations d’étude de la langue ou de connaissances à maîtriser (temps de conjugaison, informations sur une date historique, rappel du vocabulaire adapté…), au risque que l’élève perde de vue les objectifs.
Des consignes en décalage avec la réalité de l’exercice : un manuel de CM1 invite les élèves à rédiger un texte sur leur passé, faisant appel à leurs souvenirs et leurs émotions, alors qu’il s’agit seulement, à ce moment-là, de vérifier la conjugaison de l’imparfait.

Des activités peu focalisées sur l’utilisation de l’écrit pour apprendre

L’écriture réflexive (écrire pour construire sa pensée) et l’écriture de synthèse (écrire pour faire un point sur ses connaissances) sont rarement intégrées dans les manuels.

Quelques exemples
Exercice d’écriture réflexive : à l’occasion d’un débat entre élèves, un manuel de CM2 propose de préparer le débat à l’écrit pour en conserver une trace personnelle et mesurer l’évolution de l’idée à la suite de l’échange de points de vue.
Exercice d’écriture de synthèse : après un retour individuel et collectif sur ce que l’élève a appris et compris d’une séquence, un manuel de 6e invite l’élève à s’appuyer sur ce travail pour rédiger son bilan en trois paragraphes et avec l’aide de trois questions.

En revanche, les manuels se centrent principalement sur la production de textes narratifs et la prolongation de textes lus.

La différenciation bien intégrée pour les activités de production écrite

Les manuels de 2016 prennent en compte la nécessité de proposer un enseignement différencié. Cela se traduit de différentes manières :

  • graduer la tâche : compléter des phrases, puis développer un texte, et enfin rédiger un texte ;
  • varier les formats : alterner échanges oraux en binômes et écriture autonome, faire une dictée à l’adulte, proposer un exercice détaillé suivi du même type d’exercice en autonomie…