Actions volontaristes en France
en faveur de la mixité à l'école


 

Partout en France, des actions volontaristes sont mises en place par des acteurs de terrain afin de favoriser la mixité à l’école.  À l’occasion de la conférence de comparaisons internationales sur cette thématique, le Cnesco a sélectionné, en juin 2015, des projets menés par ces acteurs de terrain afin de connaître, concrètement, le contenu de leur action.

 

La ville de Guyancourt (29 000 habitants) donne une grande importance à la question de la mixité sociale, particulièrement à l’école. Ainsi, chaque école, sans exception, présente une population socialement équilibrée. Pour atteindre cet objectif de mixité en milieu scolaire, la ville agit sur deux leviers : l’aménagement urbain et la carte scolaire.

La mixité urbaine est, depuis 30 ans, une priorité de la ville. Elle se traduit au sein des quartiers par une politique volontariste fondée sur l’équilibre entre 50% de logements locatifs aidés et 50% d’accession à la propriété. Ces quartiers permettent de favoriser la mixité à l’école. La politique de la carte scolaire permet de conforter cet objectif.

François Deligné, maire de Guyancourt, ancien instituteur, directeur d’école et, enfin, professeur des écoles spécialisé dans un réseau d’aide aux enfants en difficulté, est à l’initiative de cette politique.

À Evry, le lycée professionnel Charles Baudelaire a constaté, au fil des années, une ethnicisation de certaines formations, en particulier le bac professionnel des métiers du commerce. Cette situation engendrait le développement de certaines attitudes et une difficulté des élèves à s’approprier les codes attendus par l’entreprise.

« Le fait de mettre plus de mixité dans les classes est salvateur, tant pour les élèves que pour les enseignants. »
Eric Dogo, Proviseur Adjoint du Lycée professionnel Charles Baudelaire d’Evry

Dès la rentrée 2014, la décision fut prise de mettre en place une seconde professionnelle à orientation progressive donnant ainsi aux élèves la possibilité de choisir une spécialité (commerce, vente ou accueil) en 1ère. Cela a permis de décaler la sélection d’une année et ainsi créer une réelle mixité dans les classes de seconde.

Cela a permis de décaler le choix d’orientation d’une année et ainsi de créer une réelle mixité ethnoculturelle et de genre dans chacune des formations.

Le Conseil Général de Meurthe-et-Moselle mène actuellement un travail d’adaptation de sa carte scolaire pour faire face à la forte baisse démographique enregistrée dans le département ces vingt dernières années.

« La mixité sociale sera comprise et acceptée des familles lorsque tout collégien pourra fréquenter un collège assez proche de son domicile, moderne, où il fait bon vivre et où il pourra rencontrer des camarades d’origines différentes. »
Michel Biedinger, Directeur de l’Éducation au Conseil Départemental de Meurthe-et-Moselle

La mixité sociale est un critère d’analyse pris en compte par le Conseil Général pour définir la sectorisation d’un collège. Pour cela, il mène ce travail en étroite collaboration avec le Ministère de l’Éducation Nationale. La volonté des deux partenaires est d’équilibrer l’attractivité des collèges à la fois sur le territoire (infrastructures, carte d’implantation) et sur l’offre de formation et d’éducation (langues vivantes, options, formation de jeunes sapeurs-pompiers, résidences d’artistes…).

À Chauny (Picardie), le lycée général et technologique Gay Lussac et le lycée professionnel Jean Macé sont désormais réunis sous une même direction et présents sur deux sites proches. Un changement qui permet de mélanger, non sans difficultés, les populations scolaires jusqu’alors très ségrégées entre les deux établissements.

Ce nouveau complexe scolaire de 2000 élèves permet la recherche d’une culture commune pour les élèves et les personnels. La diversité de ses publics et de son offre de formation guide ses dirigeants à créer des espaces et des moments permettant à chacun de se reconnaître dans cette nouvelle structure. Cette volonté répond à un objectif du mieux vivre ensemble.

« Nous sommes au tout début de cette culture commune qui exige aussi une équité de traitement, en particulier matériel, pour les usagers des deux sites. »
Jean-Louis Valentin, proviseur des lycées publics de Chauny

Créer cette culture commune passe aussi par une réelle volonté de mixer les publics, par exemple lors  de sorties culturelles en dehors du temps scolaire ou dans la participation du lycée aux nombreuses actions de valorisation des élèves organisées par le Rectorat (olympiades, prix de l’éducation…).

La ville de Nîmes a fait le constat d’une absence de mixités sociale et ethnoculturelle dans plusieurs de ses quartiers et d’un niveau d’échec scolaire plus élevé dans les écoles publiques qui y sont implantées. Elle a donc choisi d’agir en faisant appel à la recherche scientifique pour identifier de nouvelles pistes d’actions en faveur de la réussite scolaire. L’action de la commune se centre sur le premier degré, qui relève de la compétence des villes et qui représente le berceau des retards d’apprentissages constatés.

Cette expérience est ainsi conduite avec deux chercheurs anthropologue et sociologue du milieu universitaire Montpelliérain – Geneviève ZOIA et  Laurent VISIER – et concerne un des quatre quartiers de la ville de Nîmes très fortement ségrégués socialement.

Une véritable démarche « d’empowerment », qui rend les habitants plus actifs, a été mise en place, via une consultation des associations, habitants, enseignants, parents d’élèves et du centre social. Un travail qui sert à la fois la recherche, grâce à un vaste panel de témoignages, et la mise en œuvre concrète d’une politique éducative, par la réalisation d’un programme architectural de l’école étudiée.

En 2003, le collège Arthur Rimbaud d’Amiens a été refait et déplacé de son lieu initial : la zone la plus défavorisée d’Amiens Nord. La volonté d’y créer une mixité sociale a été impulsée il y a 10 ans et n’a cessé de se développer. Elle est apportée par des élèves d’un quartier plus favorisé (quartier Saint-Pierre) et par la scolarisation d’élèves intellectuellement précoces qui viennent de toute la ville.

Afin d’attirer des élèves du quartier Saint Pierre, le collège a été pensé pour assurer au maximum la sécurité des élèves : une seule entrée, surveillée, et une navette qui transporte les élèves du quartier Saint-Pierre juste devant le collège. Mais l’établissement propose surtout une pédagogie innovante et des enseignements attractifs (parcours bilangues, sections sportives tennis et football, latin).

« Maintenir cette mixité relève du défi et demande une vigilance quotidienne. »
Christophe Calippe, principal du collège Arthur Rimbaud d’Amiens

Les parents des élèves de CM2 de St Pierre sont accueillis et visitent le collège chaque année. Les  deux classes de CM2 sont régulièrement accueillies au collège. L’impact de cette mixité se ressent dans le climat général du collège et dans ses bons résultats (en 2014, 83.5 % de réussite au Brevet).

Dans le quartier très ségrégé du Mirail, à Toulouse, le collège Vauquelin (classé Réseau d’Éducation Prioritaire, REP) s’efforce de développer la mixité sociale. Le collège recrute ses élèves dans 9 écoles primaires. Trois sont classées en REP. Les six autres proviennent de quartiers plus favorisés.

En 2010, seuls 44% des parents concernés souhaitaient inscrire leurs enfants dans le collège. Un grand travail de communication a été mis en place auprès des parents, et plus globalement, au niveau du quartier. Le projet pédagogique a intégré les écoles au sein du collège, en le présentant comme un lieu de ressources (CDI, salle des arts) mis à disposition de ces écoles.

« Il faut aller convaincre les parents, dans les écoles, parfois dès la maternelle. »
Muriel Benazet, principale du collège Vauquelin de Toulouse

Un regard particulier est également porté sur la composition des classes. Par exemple, le parcours bilangues est réparti sur 4 classes alors qu’il ne comprend que 12 élèves. Aujourd’hui, 75% des parents concernés souhaitent inscrire leurs enfants dans ce collège. Ces chiffres se sont traduits par plus de mixité sociale au sein de l’établissement.