Préconisations du Cnesco
sur l'enseignement professionnel


De vraies solutions pour l'enseignement professionnel

Éclairé par le travail collectif de 200 décideurs, par des expériences internationales ayant prouvé leur efficacité et des projets innovants menés en France, le Cnesco présente ses préconisations pour améliorer l’orientation, les formations et l’insertion des jeunes dans l’enseignement professionnel.

Orientation

Ces classes, institutionnalisées dans le cadre de la réforme du collège, doivent être suspendues au bénéfice de dispositifs offrant un accompagnement pédagogique renforcé aux élèves en difficulté répartis sur plusieurs classes de collège exclusivement. Les recherches ont montré que ces classes d’orientation précoce, fortement ségréguées et stigmatisantes, nuisent aux apprentissages des élèves en difficulté et renforcent les inégalités sociales, à un âge où les projets professionnels ne sont pas encore construits.

Les élèves et leurs familles doivent recevoir des informations quantitatives et qualitatives sur le contenu des formations et l’insertion des diplômés de l’enseignement professionnel par domaine de formation aux niveaux national et régional (professions réellement exercées, conditions d’emploi), ou dans des aires géographiques pertinentes.

Les trop nombreux diplômes (quelques 200 CAP et 100 baccalauréats professionnels) conduisent à une offre peu lisible pour les familles. L’offre de formation doit être simplifiée afin de regrouper des diplômes trop proches les uns des autres et qui correspondent à des formations trop étroites. Les intitulés des diplômes professionnels doivent être compréhensibles pour les jeunes et leurs familles. Par exemple, la formation de « chaudronnier », aujourd’hui pénétrée par l’électronique, donne une image faussée.

Ils l’ont mis en place…
Au Québec, le site Internet toutpourreussir.com propose une lisibilité totale sur l’insertion de chaque métier. Ainsi, il présente un « Top 50 » des métiers de la formation professionnelle, basé sur deux critères : les études qui mènent à des professions pour lesquelles les perspectives d’emploi pour les cinq prochaines années sont acceptables ou favorables, et les formations pour lesquelles il est souhaitable de hausser les inscriptions afin de combler les postes qui devraient être disponibles sur le marché du travail. Enfin, pour chaque métier, une cartographie des régions présente les territoires où ce métier a les meilleures perspectives.

La mesure visant à retarder le choix d’une spécialité de formation professionnelle en classe de seconde professionnelle doit faire l’objet d’une évaluation, tout comme les expérimentations visant à repousser l’orientation vers le professionnel/général ou technologique à la fin de la classe de seconde.

Ils l’ont mis en place…
Le lycée Charles Poncet de Cluses a mis en place une seconde professionnelle indifférenciée, grâce à un regroupement des compétences communes à trois bacs professionnels (technicien d’usinage, technicien outilleur et productique mécanique). Plusieurs temps en entreprise sont proposés durant l’année, dans chacune des spécialités, afin d’accompagner les élèves dans leurs choix d’orientation. Les parents sont également mobilisés grâce à des temps d’échanges réguliers.

Formation

Pour construire une réelle culture de mixité sociale, il est nécessaire de développer des lycées polyvalents en les faisant évoluer, afin de rassembler des élèves issus des voies professionnelle, technologique et générale lors de certains modules d’enseignement (EPS, langues vivantes, …) ou pour des projets communs.

Ils l’ont mis en place…
En Norvège et en Suède, le renforcement de l’enseignement général au sein de la formation professionnelle initiale est illustré par la présence d’élèves qui suivent, dans les mêmes établissements, pour les uns, un cursus professionnel, pour les autres, un cursus général, sachant que parfois, ils peuvent suivre des cours communs.

Trop d’élèves engagés dans la voie professionnelle n’ont pas les compétences nécessaires pour s’adapter au monde de l’entreprise. Des modules d’acquisition de compétences sociales et comportementales doivent être créés, directement connectés aux apprentissages en situation de travail.

Mettre en œuvre des stratégies efficaces, à partir de projets professionnels reproduisant des situations de travail, pour garantir une meilleure compréhension des notions et concepts théoriques abordés.

Ils l’ont mis en place…
Le lycée professionnel Henri Brule de Libourne a développé, dans la préparation du baccalauréat professionnel Gestion-Administration, la gestion d’une entreprise virtuelle par les élèves avec la création d’un environnement numérique très développé (magasin en ligne, standard téléphonique, banque en ligne, centre des impôts). Les enseignants interviennent souvent en binôme.

Rééquilibrer les budgets ERASMUS + et la carte des assistants de langues vivantes en faveur des élèves de l’enseignement professionnel pour favoriser l’apprentissage des langues par immersion.

Ils l’ont mis en place…
Le lycée polyvalent du Haut-Barr de Saverne (frontière franco-allemande) a intégré dans le cursus du baccalauréat professionnel Plastiques et composites un projet d’échange avec une classe allemande, comprenant un voyage des élèves en Allemagne et l’accueil de leurs camarades en France, et des visites d’entreprises dans les deux pays. Les élèves étudient deux langues vivantes obligatoires : l’anglais (indispensable pour une poursuite d’études) et l’allemand (certains seront amenés à travailler en Allemagne).

Enseignement supérieur et insertion professionnelle

Ce label permettrait de valoriser les entreprises qui s’engagent dans une réelle dynamique de formation des jeunes et de garantir à ces derniers une formation de qualité grâce à des engagements de plusieurs natures : formation des tuteurs et des maîtres de stages à l’accueil, à la formation et au suivi des jeunes, connaissance des programmes d’enseignement de l’Éducation Nationale, élaboration de programmes de formation pour les stages, mise en place d’actions de mentorat ou de parrainage, échanges réguliers avec les enseignants.

Ils l’ont mis en place…
L’association pour la formation aux métiers de l’aérien (AFMAÉ) met en place actuellement une action de mentorat dans son centre de formation d’apprentis pour permettre aux apprentis d’échanger avec leur mentor sur les savoir-être et les savoir-faire, avoir un accompagnement tout au long de l’apprentissage et au-delà (réussir un entretien d’embauche, connaître les codes pour intégrer une entreprise). Les mentors sont formés afin de pouvoir accompagner au mieux les apprentis. Une plateforme numérique permet de mettre en contact les mentors avec les jeunes, afin qu’ils forment eux-mêmes leur binôme.

L’objectif est de développer la motivation des élèves de l’enseignement professionnel et de favoriser leur intégration dans un cycle d’études supérieures par un accompagnement adapté, aussi bien sur le plan pédagogique que sur le plan psychologique : mise en confiance individualisée, soutien méthodologique en petits groupes, emploi du temps spécifique, mise en place d’activités transversales.

Ils l’ont mis en place…
Le lycée polyvalent Jean Lurçat de Perpignan a développé le projet « Parcours ambition BTS ». Dès la fin de l’année de 1ère, les élèves susceptibles de poursuivre en BTS sont identifiés. Ils auront, en terminale, quatre heures hebdomadaires d’accompagnement (français, anglais, …). Un livret personnel de compétences et de connaissances permet de suivre l’évolution de chaque élève. De plus, un parrainage entre les étudiants du BTS et les élèves du baccalauréat professionnel se met en place et se poursuit, sous forme de tutorat, lors de la première année de BTS.

Face à des mutations économiques de plus en plus rapides, il est urgent de mettre en place une organisation qui garantisse un rythme de rénovation des diplômes de l’enseignement professionnel d’au maximum cinq ans. Les professionnels en activité, de tous les types d’entreprises (TPE, PME, grands groupes, …), doivent être davantage impliqués dans l’élaboration des diplômes. À partir d’études sectorielles sur l’emploi, commandées à des organismes publics de recherche indépendants, l’offre doit permettre une meilleure adéquation des formations au marché du travail et à ses mutations.

Enseignants

Pour faire face à la pénurie d’enseignants, le recrutement de personnels ayant une expérience professionnelle de 5 ans dans un domaine professionnel en rapport avec une discipline à enseigner doit être possible. Ces nouveaux enseignants obtiendront leur Master dans le cadre de la validation des acquis de l’expérience et en suivant des modules de formation continue.

Cet élément de formation initiale qui existe déjà dans les Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ÉSPÉ) pour les professeurs stagiaires du second degré technologique et professionnel doit être étendu à tous les futurs enseignants du second degré.

Des professionnels en activité, au plus près des mutations professionnelles, seront sollicités pour des interventions ponctuelles et ciblées, comme cela se fait déjà dans l’enseignement supérieur.