Inégalités territoriales
de décrochage scolaire


Focus sur les inégalités territoriales de décrochage scolaire

Pour analyser le décrochage scolaire au niveau territorial, Boudesseul (Cnesco, 2017) utilise un indicateur de stock, à savoir le taux de non-diplômés parmi les 15-24 ans non scolarisés, obtenu à partir des recensements disponibles de l’Insee. Ainsi, en France métropolitaine, 25 % des 15-24 ans non-scolarisés sont sans diplôme (Boudesseul, Cnesco, 2017 ; Insee, 2013).

Des disparités marquées entre académies

L’indicateur laisse apparaître une forte disparité du décrochage scolaire selon les académies. Ainsi, les académies du nord (Lille, Amiens), d’Île-de-France (Créteil) et du sud-est (Corse, Montpellier, Aix-Marseille) de la France sont nettement plus touchées par le décrochage scolaire.

À l’inverse, les académies de l’ouest de la France (Rennes, Nantes) sont bien moins touchées par le décrochage scolaire.

 

 

Part des non-diplômés parmi les 15-24 ans non-scolarisés, par académie (2013)

Entre 2006 et 2013, la moyenne nationale a diminué de 2 points. Cette baisse se retrouve au niveau académique, où aucune académie n’a vu augmenter la part de non-diplômés parmi les jeunes non-scolarisés.

Mais derrière cette baisse généralisée du décrochage scolaire, se cachent des réalités territoriales très différentes, appuyés tant sur les inégalités internes au système scolaire que sur les inégalités à caractère spatial. Pour analyser finement la situation actuelle, il est intéressant d’analyser les évolutions de chaque académie, comparativement aux autres, et dans le temps (entre 2006 et 2013).

Les académies ayant plus de décrochage scolaire que la moyenne nationale

Au sein des académies présentant le plus de difficultés vis-à-vis du décrochage scolaire, plusieurs phénomènes semblent se mettre en place.

L’académie de Lille, qui connaît un taux important de décrochage scolaire, a connu une trajectoire négative. Si le taux de décrochage a baissé moins vite dans l’académie de Lille qu’ailleurs, les disparités se sont accrues au sein même de l’académie, augmentant ainsi le nombre de territoires en grande difficulté.

À l’inverse, des académies comme Aix-Marseille et Montpellier sont entrées dans un cercle vertueux de lutte contre le décrochage scolaire. En effet, elles ont réussi à faire baisser leur taux de décrochage scolaire plus vite que la moyenne nationale, tout en réduisant les inégalités entre les territoires de leur académie.

L’académie de Créteil a, pour sa part, réussi à s’inscrire dans la baisse moyenne française, tout en stabilisant les disparités entre ses différents territoires.

Dans les académies les plus exposées au décrochage scolaire, plusieurs facteurs de risque, dépendant du contexte territorial, peuvent être identifiés. La très grande majorité de ces académies ont une part plus élevée de familles monoparentales, un chômage plus élevé et, à un moindre niveau, une part importante de familles nombreuses et de personnes non diplômées parmi les 45-54 ans.

De manière générale, les académies les plus en difficulté sur le décrochage scolaire cumulent de nombreux facteurs de risque liés au décrochage scolaire.

L’académie de Lille apparaît comme la plus exposée aux facteurs de risque de décrochage scolaire. Elle se trouve en effet, sur chacun des indicateurs, parmi les 8 académies les plus fortement touchées. Les académies d’Amiens et de Créteil présentent également une forte accumulation des facteurs de risque.

À l’inverse, l’académie de Nice, qui est également confrontée à un fort décrochage scolaire, est confrontée à peu de facteurs de risque de décrochage.

Les académies ayant autant de décrochage scolaire que la moyenne nationale

Globalement, les académies qui sont dans la moyenne du décrochage scolaire français ont suivi des tendances similaires à la moyenne nationale, notamment les académies de Bordeaux, Dijon, Reims et Lyon.

Certaines d’entre elles ont réussi à améliorer leur situation. Ainsi, l’académie de Besançon a vu son taux de décrochage diminuer plus rapidement qu’ailleurs et a vu baisser sa part de territoires en grande difficulté. De même, dans l’académie de Versailles, la baisse du taux de décrochage a eu un effet positif sur l’égalité entre les territoires.

En revanche, les académies de Nancy-Metz et de Limoges ont vu leur situation s’améliorer moins vite que la situation nationale.

Les académies ayant moins de décrochage scolaire que la moyenne nationale

Logiquement, avec une situation de départ plus favorable, les académies les moins touchées par le décrochage scolaire voient, souvent, leur taux de décrochage scolaire diminuer moins vite que la moyenne française.

Cependant, l’académie de Poitiers voit sa position se dégrader à tous les niveaux. En effet, la situation dans l’académie de Poitiers ne s’est pas améliorée au même rythme qu’en France et a vu augmenter les inégalités entre les territoires et, particulièrement, la proportion des territoires les plus en difficulté.

À l’inverse, l’académie de Paris a capitalisé sur la baisse du décrochage pour diminuer les inégalités entre ses territoires.

L’analyse de l’évolution du taux de décrochage par académie selon trois critères (évolution par rapport aux autres académies, évolution des inégalités dans l’académie, évolution de la part des cantons les plus en difficulté) met en évidence la difficulté de faire profiter l’ensemble du territoire d’une baisse globale. Deux approches peuvent être menées :

  • une approche globale, en ciblant sur des priorités autres que territoriales (niveaux de scolarisation, voies général, technologique ou professionnelle, types d’établissements, etc.) ;
  • une approche spécifique, concentrant l’effort sur certains territoires ciblés (tels que l’éducation prioritaire, la politique de la ville, etc.).