Une absence de politique de mixité volontariste entre et dans les établissements

Non seulement, aucune politique volontariste de mixité sociale entre les établissements n’a été menée depuis trois décennies, mais le collège unique français est marqué par une histoire riche de dispositifs ségrégatifs qui se cumulent.

Une absence de politique volontariste de mixité sociale

La réforme de 2007 d’assouplissement de la carte scolaire n’a pas eu les effets bénéfiques prévus. Certes quelques académies, comme Paris, ont vu les taux de boursiers progresser dans leurs lycées les plus élitistes, mais les procédures Affelnet, orientées sur l’objectif trop rustique de progression des boursiers dans les lycées favorisés, n’ont pas permis de diversifier socialement la composition des établissements.

En 2013, l’objectif de mixité à l’école a été introduit, pour la première fois, dans la loi de Refondation de l’école. Cependant, aucune politique volontariste nationale de mixité scolaire n’a été mise en œuvre ces dernières années. Seule une expérimentation à petite échelle a vu le jour en fin de quinquennat.

Zoom sur... les expérimentations sur la mixité à l'école

Le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a promu à l’automne 2015, dans une logique bottom-up, des expérimentations autour de la mixité sociale dans une vingtaine de territoires volontaires. Un an plus tard, le nombre de territoires pilote engagés dès la rentrée 2016 s’est considérablement réduit. Les zones les plus ségréguées comme le Nord et la région PACA n’entrent pas dans le champ de l’expérimentation et seul le collège est concerné par ces expérimentations.

En un an, ces premières tentatives d’expérimentation n’ont pas convaincu d’autres collectivités. Ces débuts montrent certainement que cette logique bottom-up doit être aussi associée à des objectifs nationaux volontaristes. Par ailleurs aucune politique de prévention de la ségrégation à l’école, telle que l’intégration d’un volet « mixité sociale » lors de la construction d’un établissement, n’a été promue par le ministère.

Ils l'ont déjà fait ailleurs... et en France

À l’étranger, plusieurs pays ont mis en place des politiques nationales volontaristes. En Belgique francophone, les périodes d’inscriptions aux écoles ont été uniformisées entre les écoles. Les publics défavorisés sont autorisés à s’inscrire avant l’ouverture officielle des dates d’inscription. Aux États-Unis (Massachusetts), le choix des parents est encadré, afin qu’aucune école ne dépasse de plus de 15 % le taux d’élèves défavorisés parmi sa population. Aux Pays-Bas, dans certaines communes, les parents doivent choisir plusieurs écoles, par ordre de préférence.

En France, des actions ont également été mises en œuvre, localement. À Amiens, un collège a été déplacé dans la zone la plus défavorisée de la ville, avec la mise en œuvre de pédagogies innovantes, d’échanges réguliers avec les parents et d’une politique de transports et de sécurité autour de l’établissement. La communication avec les parents, parfois dès la maternelle a permis également d’améliorer la mixité dans un collège de Toulouse. À Chauny (Picardie), un lycée général et un lycée professionnel ont été réunis et développent une culture commune entre élèves des différentes voies d’enseignement et entre enseignants.

Une histoire continue des dispositifs ségrégatifs au collège

Depuis l’avènement du collège unique, une succession de dispositifs dérogatoires ont été développés par l’institution.

Des 4es/3es technologiques dans les années 1990, en passant par les 3es d’insertion ou de soutien, jusqu’aux actuelles 3es prépa-pro intégrées dans la réforme du collège de 2016, une part significative des élèves français ne connait pas le collège unique, particulièrement en 3e. La ségrégation s’effectue par le bas (pour les élèves les plus faibles), mais aussi, récemment, par le haut (pour les meilleurs élèves, avec des classes européennes par exemple).

Ils l'ont déjà fait ailleurs...

En Pologne, le collège unique a été reconstruit. Jusqu’à la fin des années 1990, le système éducatif polonais était composé de seulement deux niveaux scolaires : le primaire et le secondaire, qui était divisé en deux voies d’enseignement (la voie professionnelle, qui regroupait 80 % des élèves, et la voie générale). À la fin des années 1990, ce système a été entièrement restructuré, et la Pologne a créé un collège unique, repoussant ainsi d’un an l’âge du choix de la voie professionnelle. Le programme du collège unique s’est focalisé autour de trois grands axes : acquisition des connaissances, développement des compétences et développement des attitudes.