Restauration scolaire


La restauration scolaire en France
Une disparité d'accès et de service

Les principaux résultats de l'enquête

En France, un service de restauration scolaire est proposé dans la quasi-totalité des établissements du second degré, alors que d’autres pays (Norvège, Danemark…) ne proposent pas, systématiquement de repas à leurs élèves. Aussi, en France, la fréquentation du restaurant scolaire est assez forte, mais laisse apparaître une réelle disparité d’accès selon les catégories socio-professionnelles des parents. Face à cela, des politiques tarifaires liées aux ressources des familles ne sont pas systématiquement mises en place par les collectivités territoriales. Sur l’organisation du repas, les élèves disposent, très majoritairement, d’un temps suffisant pour déjeuner, dans des restaurants scolaires désormais organisés en self-services et proposant plusieurs plats principaux. Des produits frais et de saison sont utilisés de manière régulière.  Cependant, malgré des efforts de modernisation, les restaurants scolaires utilisent encore peu de produits locaux et bio, proposent rarement une alternative végétarienne et ne mettent pas toujours en place un dispositif de tri sélectif.

Le déjeuner : un moment très important dans la journée d'un élève

Le déjeuner joue un rôle primordial dans la journée d’un élève. La recherche montre, en effet, que le déjeuner a un réel impact sur la qualité de vie des élèves et sur leurs apprentissages scolaires.

Ainsi, Belot et James (2011) ont montré que les élèves, notamment les plus défavorisés, bénéficiant d’un déjeuner nourrissant et équilibré sont plus attentifs et dans de meilleures conditions pour apprendre que les élèves ne bénéficiant pas d’un repas équilibré. Un impact sur les résultats scolaires des élèves a été mis en évidence, ainsi qu’un recul de l’absentéisme lié à des maladies. Des études montrent également l’existence d’un lien entre la fréquence des repas pris à la cantine et la protection contre le surpoids et l’obésité (cf. Florin & Guimard, Cnesco, 2017).

Enfin, le déjeuner est aussi un temps de socialisation et d’apprentissage de la citoyenneté.

L’organisation de la restauration scolaire peut donc avoir un effet important sur la qualité de vie des élèves et mérite ainsi d’être analysée.

Zoom sur... le petit-déjeuner à l'école primaire

Si le moment du déjeuner est important, des études se sont également concentrées sur le petit-déjeuner. Ainsi, en 2016, le programme Magic Breakfast a été mis en place dans plus d’une centaine d’écoles anglaises (8 600 élèves). L’étude montre que la création de « clubs petits-déjeuners » au sein des écoles, avec un temps dédié, en amont du temps de classe, est associé à une augmentation du niveau en lecture, écriture et mathématiques de l’équivalent de 2 mois d’enseignement par an pour les élèves en classe de CP. Les évaluateurs ont également constaté une amélioration de la concentration et du comportement des élèves. Les effets sont plus limités, mais toujours significatifs, sur les élèves de CM2. Ce programme a un effet positif sur l’ensemble des élèves, qu’ils soient issus de familles favorisées ou défavorisées, et s’explique par une évolution du contenu du petit-déjeuner et du contexte.

Le petit déjeuner à l’école est une pratique de plus en plus répandue en Angleterre. En Suède, il est proposé à tous les élèves.

En France, le ministère conseille de ne pas donner de collation à moins de deux heures du repas. En revanche, il précise qu’il peut être envisagé de « proposer aux élèves une collation dès leur arrivée à l’école maternelle ou élémentaire » notamment pour prendre en compte les diverses conditions de vie des enfants et des familles.

Une forte fréquentation des restaurants scolaires

70 % des élèves français scolarisés en collèges publics sont inscrits à la cantine, ils sont 68 % dans les lycées (données Depp extraites de la Base centrale de pilotage (BCP), 2016 ; traitement Cnesco, 2017).

Durant les 20 dernières années, la fréquentation du restaurant scolaire a nettement augmenté. Ainsi, en 1996, seuls 55 % des collégiens du secteur public étaient inscrits à la cantine, soit 15 points de moins qu’en 2016 (données Depp extraites de la BCP, 1994- 2016 ; traitement Cnesco, 2017).

Mais des inégalités sociales importantes dans l'accès à la restauration

Si la fréquentation de la restauration scolaire est, en moyenne, élevée en France, elle cache de fortes disparités selon le contexte social familial des élèves. Si, en moyenne, 29 % seulement des collégiens ne sont pas inscrits à la cantine, c’est le cas de près de 59 % d’entre eux en éducation prioritaire. Dans les collèges classés en REP+, seul un élève sur quatre est inscrit au restaurant scolaire (données Depp extraites de la BCP, 2016 ; traitement Cnesco, 2017). Plus généralement, au-delà de ces disparités selon le type d’établissement, en éducation prioritaire ou pas, des inégalités sociales d’accès à la restauration touchent tous les élèves. En moyenne, au collège, les élèves issus de familles défavorisées sont deux fois plus nombreux (40 % d’entre eux) à ne pas manger à la cantine que les élèves issus de familles favorisées (22 %) et très favorisées (17 %).

Des politiques tarifaires pas systématiquement liées aux revenus des parents

Selon l’enquête menée par le Cnesco, le prix moyen d’un repas facturé aux familles est de 3,30 € dans les établissements publics du second degré. Dans le privé, les prix sont nettement plus élevés, se situant en moyenne, à 5,40 € le repas.

Face à des prix de restauration facturés aux familles, certes nettement inférieurs aux coûts réels, mais qui ne sont pas négligeables pour des familles défavorisées, et en particulier pour les familles nombreuses, les collectivités territoriales, responsables de la politique de restauration ne pratiquent pas systématiquement de politiques tarifaires adaptant mécaniquement le prix du repas  aux ressources des familles. En effet, 55 % des établissements du second degré déclarent qu’il n’existe pas une politique tarifaire spécifique pour leurs élèves les plus démunis. Seuls 22 % des établissements proposent une grille pouvant aller jusqu’à la gratuité.  Quand elles existent, ces politiques tarifaires se définissent principalement à partir du revenu des parents et/ou de l’obtention d’une bourse, mais peuvent également prendre en compte le nombre d’enfants demi-pensionnaires de la famille.

Lorsque les familles ne paient plus la cantine, les chefs d’établissement privilégient très majoritairement la solution à l’amiable, à travers la recherche d’aides sociales complémentaires (fonds social, prise en charge temporaire par la collectivité territoriale, CAF…). Ainsi, les familles les plus démunies sont accompagnées dans leurs procédures de demandes d’aides. Les recours à des procédures de recouvrement auprès du tribunal ou d’un huissier, s’ils existent, ne sont pas majoritaires. Dans des cas plus rares, un nouveau calendrier de paiement est proposé aux familles, voire une désinscription au restaurant scolaire est décidée.

Un temps de déjeuner suffisant

Le temps accordé au déjeuner est un élément important. Selon l’enquête du Cnesco, dans 85 % des établissements du second degré, les élèves bénéficient d’au moins 30 minutes pour déjeuner. Ce n’est pas le cas dans seulement 10 % des établissements (les autres ne se prononcent pas).

Si les 30 minutes de déjeuner sont globalement respectées, une étude menée localement auprès de 557 écoliers et collégiens  (Guimard, Bacro, Ferrière, Florin, Gaudonville, pour la Depp, 2016)  montre une perception différente par les élèves. Ainsi,  selon cette étude, 46 % des écoliers et collégiens trouvent qu’ils n’ont pas assez de temps pour déjeuner au restaurant scolaire.

Lorsque les élèves disposent de moins de 30 minutes pour déjeuner, les répondants à l’enquête du Cnesco précisent que cela peut s’expliquer par des contraintes d’emploi du temps et le manque de place, voire par un temps d’attente trop important. 25 % des établissements déclarent avoir été interpellés sur le temps accordé au repas durant l’année écoulée, très majoritairement par les élèves ou leurs parents.

Des organisations modernes mais pas toujours adaptées aux habitudes allimentaires

La cantine traditionnelle a désormais laissé place à des espaces plus modernes, organisés en self-service et/ou en îlots (ou buffet), dans 93 % des établissements du second degré (89 % disposent d’un self-service). Si les cantines d’autrefois proposaient un régime unique, la restauration scolaire en 2017 fait davantage de place aux choix dans les plats. D’après l’enquête du Cnesco, 63 % des établissements du second degré proposent un choix entre au moins deux plats principaux, alors que les autres ne proposent qu’un seul plat. Proposer plusieurs plats est une pratique plus courante au lycée (81 % des établissements) qu’au collège (51 %).

Si la diversité des plats s’est progressivement installée dans les cantines françaises, pour autant, les régimes alimentaires spécifiques restent marginaux. Lorsqu’un élève ne consomme pas de viande ou de poisson, une alternative végétarienne n’est proposée que dans 17 % des établissements interrogés. Faute d’alternative, il lui est très majoritairement proposé, d’après les chefs d’établissement, une portion supplémentaire de légumes (dans 89 % des établissements).

Une bonne utilisation de produits frais et de saison mais rarement bio

Les établissements sont assez attentifs à l’utilisation de produits frais et de saison. Ainsi, dans plus de la moitié des établissements du second degré, les produits frais et les produits de saison sont présents dans plus de 25 % des menus proposés. Cependant, selon l’enquête du Cnesco, de nettes différences apparaissent selon que les repas sont préparés au sein de l’établissement ou non. Les prestataires privés et les cuisines centrales utilisent nettement moins de produits frais et de saison.

Les produits locaux sont également utilisés mais ils représentent une part moins importante des repas servis. Ainsi, plus de la moitié des établissements (56 %) déclarent utiliser moins de 25 % de produits locaux dans leurs repas. Enfin, les produits issus de l’agriculture biologique sont encore peu utilisés dans la restauration scolaire. Seuls 8 % des établissements déclarent proposer plus de 25 % de produits bio dans leurs repas.

Méthodologie de l'enquête

L’enquête sur la restauration scolaire, l’architecture et la vie dans l’établissement, menée par le Cnesco a été réalisée via un questionnaire en ligne, adressée  aux chefs d’établissement du second degré de France métropolitaine et des Outre-mer, du 26 juin au 16 juillet 2017. Un échantillon représentatif d’établissements a été tiré au sort, appuyé sur des critères de secteurs (public, privé) et  de types d’établissement (collèges REP/REP+ et hors REP, LEGT et LP). 869 réponses ont été jugées exploitables (avec une légère sous-représentation du secteur privé, mais avec suffisamment d’établissements privés pour analyser les résultats). Les questionnaires ont été renseignés par les chefs d’établissement, leur adjoint ou les gestionnaires.

Cette étude a été réalisée en partenariat avec le Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale (SNPDEN) et le Secrétariat général de l’enseignement catholique (SGEC). Les résultats de l’enquête sont complétés par le traitement de données nationales exhaustives produites par la Depp (MEN).

Une autre enquête a été réalisée auprès des départements et des régions. Faute de réponses suffisantes, elle ne peut être publiée.