Comparaisons internationales


Apprentissage et enseignement des langues en France et en Europe

Quelle place pour les langues dans le parcours des élèves ?

Une exposition aux langues vivantes plus précoce mais à élargir

Première langue

En France, l’apprentissage des langues a été généralisé à l’école primaire à partir de 2002. Il s’est progressivement étendu à l’ensemble des niveaux, à raison de 54 h par an, soit environ 1h30 par semaine. Depuis la rentrée 2016, cet apprentissage est généralisé du CP au CM2.

En Europe, l’apparition des langues au primaire est venue des pays de l’Europe du nord et de l’est dès les années 1960 et 1970 (Norvège, Suède, Islande, Pologne, Hongrie…). Le mouvement ne s’est ensuite étendu que lentement aux pays d’Europe de l’ouest (France, Allemagne Italie, Espagne…) qui ont attendu les années 1990 voire 2000 pour enseigner les langues au primaire. Aujourd’hui, les élèves ont, en moyenne, en Europe, entre 6 et 8 ans quand ils commencent à apprendre une langue (Eurydice, 2017).

Deuxième langue

En France, la réforme du collège de 2016 a avancé l’apprentissage d’une deuxième langue à la 5e pour l’ensemble des élèves.

En Europe, la France fait désormais partie des trois pays où la durée d’apprentissage des langues est la plus importante (plus de 1 000 heures cumulées à l’école et au collège), avec Malte et l’Allemagne (Eurydice, 2017).

Peu de LV2 dans l’enseignement professionnel

Seul un tiers des élèves français scolarisés dans l’enseignement professionnel étudient une seconde langue étrangère. Leur apprentissage de cette langue est donc plus court que pour les autres élèves. Ce phénomène existe également dans de nombreux pays européens (Autriche, Pays-Bas…).

Enseignement d’une autre matière en langue étrangère

En France, en 2011, moins de 10 % des établissements du second degré proposaient un dispositif d’enseignement d’une autre matière en langue étrangère (SurveyLang, 2011). La France faisait ainsi partie des pays ayant le moins développé ce format. Les dispositifs en place sont très hétérogènes et souffrent d’un manque de matériel pédagogique adapté.

En Europe, ce dispositif existe dans la plupart des pays. Dans la majorité des pays Européens, ce dispositif est théoriquement accessible à tous les élèves, sans critères d’admission. Dans certains pays, comme l’Espagne, il est lié au niveau des élèves en langues. En France, comme au Portugal ou en Pologne, il est lié à une combinaison du niveau des élèves en langues et dans la matière concernée. L’Italie a mis en œuvre une réforme d’envergure en 2014-2015 pour proposer, dans tous ses lycées, un enseignement des spécialités de filières en langues étrangères. Elle a mis en place un vaste programme de formation des enseignants pour les accompagner dans ces transformations majeures (Eurydice, 2017).

Des recherches montrent l’efficacité de ce dispositif

Fluidité à l’oral, connaissance du vocabulaire, confiance en soi… : les recherches (Carol, Cnesco, 2019) montrent les effets positifs de l’enseignement d’une matière en langue étrangère. Les connaissances dans la discipline enseignée ne sont pas affectées, l’apprentissage est seulement ralenti au démarrage.

6e bilangue et sections linguistiques

En France, seuls 14 % des élèves de 6e profitent d’un dispositif bilangue (étudier deux langues dès la 6e). Au lycée, les sections linguistiques ne concernent que 5 % des élèves et peuvent donner lieu à l’obtention d’un « bi-bac » (équivalence pour un diplôme à l’étranger) (Paulin-Moulard, Cnesco, 2019).

L’anglais, une place prépondérante parmi les langues étudiées

En France, la quasi-totalité des élèves apprennent l’anglais. Cependant, la diversité des langues proposée au-delà de l’anglais est très importante. Dans le secondaire, 22 langues étrangères sont enseignées à au moins une trentaine d’élèves, offrant ainsi un panel plus important que ses voisins en termes d’offre de langues.

En Europe, dans la plupart des pays, le choix des langues est laissé aux élèves et aux familles. Cependant, la moitié des pays ont fait de l’anglais une langue obligatoire à apprendre pendant le cursus (Norvège, Suède, Allemagne, Italie, Portugal…).

Qui sont les enseignants de langues vivantes ?

Au primaire, des enseignants non spécialistes et peu en confiance

En France, dans 81 % des cas, c’est l’enseignant de la classe qui se charge de l’enseignement des langues (Cedre 2016). Or, seuls 10 % à 15 % des enseignants du premier degré en France ont un parcours en langues vivantes dans l’enseignement supérieur. Dans les autres cas, un autre enseignant de l’école intervient, dans le cadre d’un échange de service (10 % des classes) ou, plus rarement, il est fait appel à un intervenant extérieur.

En Europe, ce sont également des enseignants généralistes qui enseignent les langues au primaire dans des pays comme l’Italie, l’Autriche ou les Pays-Bas. D’autres pays (Espagne, Portugal, Grèce) ont fait le choix d’enseignants spécialistes dès le primaire. Certains, comme la Norvège ou la Suède, prévoient que les enseignants peuvent être soit généralistes soit spécialistes (Eurydice, 2017).

Dans le secondaire, des enseignants spécialistes, parfois contractuels

En France, 87 % des enseignants d’anglais LV1 du secondaire sont spécialistes de cette matière, soit le taux le plus important d’Europe (SurveyLang, 2011). En LV2 (espagnol pour la France dans cette étude), seuls les Pays-Bas (72 %) ont un taux d’enseignants spécialistes supérieur à la France (69 %). Les femmes représentent 81 % des enseignants de langues (Manès & Taylor, 2018) et la moyenne d’âge est de 43 ans. En 2016, la part des contractuels est faible pour l’anglais (5 %), mais plus élevée en espagnol (10 %, doublé en cinq ans). Le taux d’enseignants natifs est de 14 % en anglais et est deux fois plus élevé en espagnol (29 %) (SurveyLang, 2011).

En Europe, au niveau du collège, les enseignants de langues peuvent encore être généralistes dans certains pays (Islande, Norvège, Serbie). Au lycée, ils sont tous spécialistes ou « semi-spécialistes » (Eurydice, 2017).

Des difficultés pour les enseignants natifs

Une recherche menée auprès d’enseignants natifs de la langue enseignée (Causa, 2008) révèle qu’ils sont également en insécurité car ils doivent apprendre à mettre à distance leur langue et leur culture pour l’enseigner. À l’inverse, les enseignants non natifs ont développé des stratégies de compréhension de la langue, qu’ils peuvent transmettre.

Un recours à des assistants de langues, surtout au collège

En France, en 2016, près de 4 500 assistants originaires de 60 pays, représentant 15 langues, intervenaient aux côtés des enseignants. Ces assistants étaient plus présents dans les collèges et les lycées (pour 80 % d’entre eux) et assez peu dans les écoles (20 %). Le programme semble néanmoins en perte d’attractivité, notamment auprès des assistants de langue anglaise, un tiers des postes restant vacants en 2017 (Manès & Taylor, 2018).